Les Archives de Roshar, T1 – Brandon SANDERSON

PRÉSENTATION DU LIVRE

CARACTÉRISTIQUES
● Les Archives de Roshar, Tome 1 ( The Stormlight Archive )
● La Voie des Rois, 1/2 ( The Way of Kings )
● Auteur : Brandon SANDERSON
● Éditeur : Le Livre de Poche
● Parution : 10 Mai 2017
● Pagination : 992
● Prix : 9,90 €
FANTASY

« Roshar, terre de pierres et de tempêtes. Des siècles ont passé depuis la chute des Chevaliers Radieux, mais leurs avatars, des épées et des armures mystiques qui transforment des hommes ordinaires en guerriers invincibles, sont toujours là.
Au cœur des Plaines Brisées, Kaladin lutte depuis dix ans dans une guerre insensée. Dalinar, le chef d’une des armées, est fasciné par un texte ancien, La Voie des rois. Au-delà de l’océan, la jeune Shallan apprend la magie et découvre certains secrets des Chevaliers Radieux… »

EXTRAIT

CHRONIQUE

Avec ses actuels 8 tomes bien fournis, « Les Archives de Roshar » constituent une saga qui peut impressionner de prime abord. De même, « La Voie des Rois » a été divisé en deux tomes dans sa version française (dont voici le tout premier) tant il est massif. J’ai sauté le pas et ne le regrette absolument pas !

Avec un cycle d’une telle ampleur, il paraît évident que l’on va d’abord passer par une longue phase d’introduction. L’univers de Brandon Sanderson a été travaillé pendant plusieurs décennies et le résultat est là. Roshar est un monde régulièrement ravagé par de violentes tempêtes, et est de ce fait sujet à de fortes érosions. La faune et la flore ont dû s’adapter ; bien que rares, les herbes sont rétractiles et la végétation dans son ensemble évoque davantage le monde sous-marin, comme on peut le voir sur les croquis de Shallan qui parsèment les pages de ce récit pour notre plus grand plaisir. Les chulls – utilisés comme bêtes de trait – s’apparentent à d’énormes bernard l’hermite, dotés d’une carapace apte à les protéger des projections de débris durant lesdites tempêtes. Dans ces paysages souvent désolés, où les arbres et les ressources se font rares, évoluent également des hachedogues, amicales créatures insectoïdes, et des crémillons, respectivement équivalents de nos chiens et fourmis. Les sprènes, quant à eux, font penser à de petites créatures éthérées, n’apparaissant que pour signaler des événements précis. Nous découvrons ainsi les sprènes de joie, de douleur, de mort… Un peu plus loin, sur les Plaines Brisées, règnent des créatures nettement moins sympathiques, les Démons-des-Gouffres, qui vont d’ailleurs jouer un rôle primordial dans les relations géopolitiques des différentes races et nations.

À cette véritable encyclopédie, s’ajoute un système de magie des plus intrigants dont la source provient de ces fameuses tempêtes. L’Homme a trouvé un moyen d’exploiter leur puissance en l’enfermant dans des gemmes qui se mettent à luire après avoir été exposées aux éléments. La Fulgiflamme récoltée permet l’utilisation de la magie pour les initiés grâce à des fabriaux, un outil fixé sur la main. La lueur émise par les gemmes s’étiole au fur et à mesure de leur utilisation jusqu’à la prochaine recharge. De ce fait, les gemmes sont devenues la monnaie d’échange la plus courante, toutes nations confondues. Liés à tout ceci, nous découvrons les Porte-Éclats, des hommes et des femmes ayant gagné d’antiques et puissantes lames et armures sur le champ de bataille, faisant d’eux de redoutables guerriers quasi invincibles pour le commun des mortels.

Après cette longue parenthèse sur le worldbuilding dont je salue la complexité, je peux désormais enchaîner avec l’intrigue en elle-même. Les premiers chapitres m’ont légèrement déstabilisée, déjà parce qu’ils se passent à des époques différentes, dans un univers qu’on ne maîtrise pas encore. Ensuite parce que chaque fois que je choisissais un personnage à soutenir, il mourait dans la foulée ! En dépit de ces premières pages nébuleuses, la magie opère et l’on rencontre Kaladin, un des protagonistes de l’histoire. Fils de médecin œuvrant à présent au cœur d’une guerre sans fin, il se bat avec ferveur, affrontant des démons tout en fuyant ceux qui l’habitent. Empreint de regrets, il reste un jeune homme d’une indéniable bonté et grandeur d’âme, qui tombera malheureusement en esclavage. Sa reconquête de la liberté sera d’autant plus compliquée qu’il se verra enrôlé de force sur le Pont 4 dans les batailles des Plaines Brisées, où deux clans rivaux s’affrontent pour abattre des monstres et récupérer leur Cœur de Gemme qui, selon le système évoqué ci-dessus, représente une fortune colossale. En parallèle à la lutte de Kaladin pour la survie, nous faisons la connaissance de Shallan, une adolescente missionnée par sa famille ruinée. Malgré sa candeur et sa soif d’apprendre, en devenant l’étudiante de la puissante Jasnah Kholin, Shallan espère avant tout lui voler son fabrial afin de le revendre et rembourser leurs dettes. Dalinar, un général sur le déclin, est en proie à d’étranges visions qui le malmènent jour et nuit et lui font progressivement perdre la confiance de ses hommes, tandis que Szeth assassine à tour de bras grâce à son incroyable maîtrise de la Fulgiflamme. Chacun de ces quatre personnages évolue indépendamment des autres, et pourtant, on sent d’emblée le lien intense qui les unit. On attend donc avec impatience de voir leurs trames se recouper !

La plume de Brandon Sanderson m’a complètement immergée dans son univers et ses mythes et légendes. Dans un monde rongé à la fois par les intempéries et les rêves de vengeance, l’espoir se fait rare et pourtant, Kaladin s’entête à lutter contre ce que les puissants prennent pour acquis. Incapable d’accepter son sort, il pousse ses compagnons à la révolte et encaisse les coups, ce qui fait de lui un personnage impressionnant de courage et de volonté. Je me suis à de nombreuses reprises senti complètement démunie face à tout ce qu’il endure. S’il ne fallait retenir qu’un protagoniste, ce serait celui-ci tant il est attachant dans ses relations à l’autre, autant que dans ce passé tortueux qu’il nous révèle peu à peu. À lui seul, il porte une bonne partie du récit et certains incidents liés aux gemmes en sa présence laissent à penser qu’il garde en lui un énorme potentiel en attente d’être dévoilé. Voilà qui me ravit d’avance ! Bien qu’elle reste encore assez en retrait dans le récit par rapport à Kaladin, j’ai aussi apprécié la curiosité de Shallan, son dilemme moral entre ses devoirs envers sa famille et son amour pour le savoir, la magie et la philosophie. La trame liée à Dalinar semble de son côté rejoindre la mythologie de Roshar, avec ces Chevaliers Radieux dont on dit qu’ils ont trahi l’humanité après l’avoir sauvée. De qui ? De quoi ? Quelques indices sont distillés au gré des pages, attisant notre intérêt et nous poussant à enchaîner les chapitres.

Ainsi, même si ce premier tome se veut purement introductif, l’auteur a su en faire une œuvre intéressante à parcourir. Il campe des personnages qui s’avèrent de suite très attachants, on suit leur parcours initiatique sans jamais s’ennuyer, même si l’ensemble demeure une lecture dense et exigeante.