Le Guide des Poètes Maudits du Docteur Loiseau

PRÉSENTATION DU LIVRE

⌧ CARACTÉRISTIQUES ⌧
Titre français : Le Guide des Poètes Maudits du Docteur Loiseau
Titre original : Dr. Bird’s Advice for Sad Poets
Auteur : Evan ROSKOS
Éditeur : Michel Lafon
Parution : 10 Novembre 2021
Pagination : 272
Prix : 16,95 €
★ Young Adult ★

« James Whitman n’est pas populaire. En même temps, quel adolescent de seize ans est passionné de poésie et serre les arbres dans ses bras ? Peut-être James aurait-il besoin d’un psy… Mais le seul qu’il a trouvé, il se l’est inventé : il s’agit du docteur Loiseau, un pigeon psychologue toujours prêt à l’écouter.
Car décidément, depuis que Jorie, sa soeur, a quitté la maison, rien ne va plus pour James. Pour retrouver sa vie d’avant, il ne voit qu’une solution : comprendre ce qu’il s’est réellement passé et ramener Jorie.
Mais très vite, l’adolescent est confronté à des secrets qu’il n’aurait jamais dû découvrir… et cette fois, les conseils du docteur Loiseau ne suffiront pas. »

EXTRAIT

CHRONIQUE

James Whitman est fan du poète du même nom. Il aime câliner les arbres sur le chemin du lycée et sauver des oisillons en perdition pour impressionner les jolies filles – une en particulier. Il n’a qu’un seul et unique ami, Derek, qui ne se prive pas de le secouer lorsque c’est nécessaire. Et James en a souvent besoin depuis que son père – la Brute – et sa mère – la Barge – ont fichu sa sœur Jorie dehors. En son absence, son sentiment de culpabilité atteint de nouveaux sommets et jette de l’huile sur le feu de sa passivité. Eux qui étaient dans la même galère, à vivre chaque jour dans le même enfer d’une famille bancale, n’auraient-ils pas pu faire front commun ? Se soutenir, survivre ensemble ? Aujourd’hui, James étouffe sous le poids de ses silences, présents comme passés. Se noie dans la dépression et l’envie d’en finir une bonne fois pour toutes. Mais avant ça, il lui faut découvrir ce qui s’est réellement passé au lycée le jour du renvoi de Jorie. Pourquoi avoir tabassé son ancienne meilleure amie et ainsi franchi le point de non-retour avec ses parents tout comme avec le proviseur ?

Par ce récit, Evan Roskos aborde avec brio des thématiques pourtant ô combien difficiles comme la maltraitance, les troubles mentaux, l’automutilation, le suicide. Il décrit parfaitement la spirale descendante dans laquelle James se retrouve coincé, lui qui a longé les murs pour ne pas tomber. le mélange d’angoisses, d’espoir, de désespoir, le piège qui se referme inexorablement sur soi et le dernier élan de rage avant de rendre les armes. Cet élan suffira-t-il à sortir James du marasme ou formera-t-il la goutte de trop qui le fera vriller pour de bon ?

J’ai adoré retrouver la prose de Walt Whitman et son corps électrique, mais la poésie de cet ouvrage ne s’arrête pas à ces extraits. Il y a quelque chose d’unique et de fantasque dans la vision que James pose sur le monde. Un tiraillement entre ombre et lumière qui démontre si bien la constante lutte interne auquel on est confronté lorsque la dépression s’installe. Il nous parle aussi du refuge que peuvent offrir l’humour et les traits d’esprit, dernier rempart contre la souffrance, pour le meilleur et pour le pire. Si Evan Roskos appuie sur le côté loufoque de James chaque fois que ce dernier entre en conversation avec son psy imaginaire, un pigeon du nom de Docteur Loiseau, il ne minimise pourtant pas l’impact que peut avoir une vraie thérapie dans ces cas-là. À trop chercher parmi les secrets de sa sœur, James va devoir affronter ceux qu’il avait lui-même enfouis au plus profond de lui.

L’auteur évoque tout cela dans une ambiance claire-obscure. Sans misérabilisme ni solution magique. Il décrit le cheminement de son (anti)héros avec beaucoup d’intelligence et de sensibilité. James déraille, mais en tire des leçons, aussi douloureuses soient elles. Le tout, d’une plume qui reste accessible à tous, qui explore la toxicité de certaines familles afin de démontrer aux victimes qu’elles ne sont pas nécessairement aussi seules et démunies qu’elles le pensent, que des solutions peuvent être trouvées à condition d’accepter d’en parler avec un tiers de confiance. Que n’importe qui peut être sujet à des crises de panique sans qu’il ne soit nécessaire de se voir stigmatisé, et sans devoir entendre les autres recourir à des lieux communs qui ne font qu’aggraver la violence des ressentis.

Ce roman se lit rapidement, et de par la force de son message, il est à mettre entre toutes les mains. Car oui, c’est parfois sombre, cru, violent, mais il est grand temps d’arrêter de croire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes sous le simple prétexte que l’on est encore jeunes. Pousser toutes ces problématiques sous le tapis reviendrait à nier les calvaires que d’autres peuvent endurer, comme s’ils n’étaient pas dignes d’être entendus/crus. S’il n’y a pas de réponses toutes faites dans ce genre de situation, Evan Roskos présente tout de même des pistes aptes à en aider plus d’un. L’humour est utilisé avec parcimonie ; les réparties de Derek et James permettent de désamorcer certaines tensions sans jamais minimiser leurs origines. Un bel hymne à la vie en dépit de tout ce qu’elle peut parfois nous infliger, à la liberté, au libre-arbitre, au dialogue à cœur ouvert et aux nouveaux départs, envers et contre tout.

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