Les Coeurs Bombes – Dario LEVANTINO

PRÉSENTATION DU LIVRE

« LES COEURS BOMBES »
Titre original : Cuorebomba
Auteur : Dario LEVANTINO
Éditeur : Payot & Rivages
Parution : 07 Février 2024
Pagination : 220
Prix : 21 €
CONTEMPORAINE

« J’ai seize ans, une maman malade et toute une vie devant moi. »
Ainsi commence le deuxième roman de Dario Levantino, où l’on retrouve le jeune Rosario, bouleversant héros de « De rien ni de personne ».
Son père en prison pour trafic d’anabolisants, sa mère en chute libre, Rosario se retrouve aux mains des services sociaux impotents et de familles d’accueil gangrénées par l’appât du gain. Séparé de Brancaccio, quartier populaire aux murs lépreux, mais quartier de l’enfance et de l’amour, ce jeune chien fou qu’on enchaîne mettra toute sa combativité et son ardeur à s’échapper : plutôt la misère et la débrouille qu’une vie sous surveillance.
Sous l’égide d’Oliver Twist, Dario Levantino signe une fois encore un roman poignant, fougueux et poétique, véritable hymne au chaos des sentiments et au pouvoir salvateur de la littérature.

EXTRAIT

CHRONIQUE

J’ai découvert ce roman au hasard d’une sélection Masse Critique sur Babelio. Je n’en avais encore jamais entendu parler et quel dommage ! Il mériterait vraiment de connaître davantage de couverture médiatique. J’ai pris une claque avec cette histoire et cette plume inoubliables !

À seize ans, entre un père en prison et une mère anorexique qui se laisse mourir de faim, Rosario fait comme il peut pour maintenir en place les fragments ébréchés de son quotidien. Au lycée, on ne lui fait pas de cadeaux. Les autres élèves ne veulent rien avoir à faire avec ce gosse des quartiers et les professeurs le rabrouent à chaque occasion, jugeant que de là d’où il vient, il n’a rien de constructif à apporter à la classe. Ballotté d’un club de football où il fait autant office de gardien de but que de punching-ball à une plage jonchée de détritus où il découvre l’amour auprès d’Anna sous un bateau renversé, Rosario trimballe son cœur-bombe au gré du vent, ses autres sources de réconfort étant ses virées à vélo sur Tronçonneuse et ces bouts de pain partagés avec Jonathan, son chien errant. Rejeté par tous, y compris par son demi-frère, Rosario garde pourtant la tête haute et se débat pour garder sa mère à flot avant que les services sociaux ne s’en mêlent. Mais un jour, cela ne suffit malheureusement plus à faire illusion. Arraché à ses rares repères dans la vie, Rosario s’enfonce tour à tour dans la révolte et la résignation.

« Anna a quelque chose qui me fascine et m’effraie à la fois, comme le vide quand on se penche du treizième étage. J’aime l’urgence de son élocution, sa manière dure de communiquer en créant des conflits pour détruire et reconstruire ; on dirait un diable qui me susurre à l’oreille le péché à commettre qui finira par me sauver. Elle n’est pas comme la Béatrice de Dante ou la Laure de Pétrarque : elle ne fait pas l’intermédiaire entre le ciel et la terre, mais entre la terre et l’abîme. »

La plume de Dario Levantino est incroyable. Incisive et poétique à la fois, elle tranche dans le vif avec des images qui parleront à tout un chacun. Le style oral reflète parfaitement le fil des pensées d’un protagoniste adolescent, mais il s’en dégage en même temps une richesse intellectuelle indéniable. Rosario a tellement plus à apporter aux autres que ce qu’ils sont prêts à lui accorder. Il lutte contre l’injustice et les préjugés avec pertinence et insolence, et on se prend vite d’affectation pour ce gamin des rues livré à lui-même. Les tranches de vie se succèdent dans la narration, Rosario passant parfois du coq à l’âne d’un paragraphe à l’autre, ce qui donne un aspect authentique au récit, comme un journal intime. Une narration décousue qui montre à quel point Rosario se raccroche au peu qu’il lui reste pour ne pas sombrer avec sa mère. Un récit qui tient en deux chapitres, le premier constituant la grande majorité du format, nous présentant un « avant » et un « après ».

Dario Levantino m’a profondément secouée avec ce titre, tant par la beauté de sa plume que par le côté écorché vif de son jeune protagoniste. Il nous y parle d’amour filial et de fatalité. De l’injustice de naître avec les mauvaises cartes en mains et d’en être accusé par la société par-dessus le marché. De cette lutte infernale à s’extirper de la boue où l’on est né pour tenter de s’élever, juste assez pour passer de la survie à une existence simple et apaisée. Il nous parle de courage, de dévouement, d’attachement. De déconstruction du noyau familial à la reconstruction de soi. D’un voyou condamné par l’opinion publique alors qu’il n’en est pas un.

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