Le spleen du pop-corn qui voulait exploser de joie

PRÉSENTATION DU LIVRE

⌧ CARACTÉRISTIQUES ⌧
Titre : Le spleen du pop-corn qui voulait exploser de joie
Autrice : Raphaëlle GIORDANO
Éditeur : Plon
Parution : 06 Octobre 2022
Pagination : 312
Prix : 20,90 €
★ Feel-Good ★

« Joy a trente-quatre ans, vingt ans dans son corps et cent ans dans sa tête. À quel moment sa prise de joie s’est débranchée ? Difficile à dire. Ces choses-là, ça arrive sans prévenir. »
Joy travaille dans une agence de celebrity marketing qui connecte des talents VIP avec de grandes marques. Dans ce monde d’image et de luxe, mieux vaut être brillant. Mais Joy ne se sent pas vraiment de talents particuliers et afin de compenser, elle se met toujours plus de pression. Elle, que son père surnommait enfant son  » p’tit pop-corn  » tant elle irradiait de gaieté, se retrouve aujourd’hui au bord de l’implosion jusqu’à en développer un toc digital qui lui donne l’illusion de garder le contrôle.
Pour couronner le tout, à la veille de Noël, voilà qu’on lui confie la délicate mission d’organiser l’événement des dix ans de l’agence. C’est là que le destin intervient pour la mettre sur le chemin de Benjamin, jeune entrepreneur plein de vie et d’optimisme. Lui et sa petite troupe ont la joie contagieuse, et cette rencontre va bouleverser Joy dans ses certitudes. Le temps de la  » désapplication  » serait-il venu ?
Mais attention, car un pop-corn qui éclate, ça fait du bruit. Beaucoup de bruit…

EXTRAIT

CHRONIQUE

Intrigue∎∎∎Rythme∎∎∎∎Créativité∎∎∎∎∎
Écriture∎∎∎∎∎Personnages∎∎∎∎∎Sentiments∎∎

Joy portait bien son nom, puisqu’enfant, elle rayonnait de joie. Aujourd’hui adulte, coordonnatrice dans une agence de marketing d’élite, il n’en est plus rien. Le dos courbé, elle encaisse les caprices de chacun sans jamais broncher. Chaque fois que la coupe menace de déborder, elle s’isole dans les toilettes de l’entreprise pour partir à la recherche d’une énième application qui l’aidera à mieux gérer son stress et ses affaires. Dans cet univers parisien où tout va trop vite, impossible de lever le pied. Et puis elle a la bonne idée de sortir avec un homme marié, qui la néglige, bien évidemment. Écrasée par le poids que font peser ses collègues sur ses épaules ainsi que par un sentiment tenace d’infériorité, Joy souffre du syndrome de l’imposteur. Elle se demande un peu ce qu’elle fait là, elle qui n’a aucun talent particulier. Sa vie personnelle ? Elle n’a pas le temps ! Pas le temps de sortir, pas le temps de s’amuser, pas le temps de se faire des amis… Isolée dans tous les domaines, elle broie du noir du matin au soir sans savoir comment s’extirper hors de cette boucle infernale.

Cerise sur le gâteau, les fêtes approchent. En cette période déjà très chargée, ses patrons lui en rajoutent une couche en lui confiant l’organisation des dix ans de la boîte, à l’insu de son plein gré. La cocotte-minute siffle encore plus fort, mais là aussi, Joy acquiesce en silence, retrousse ses manches et se néglige elle-même en tant qu’individu, avec des droits et des besoins. Entre une collègue langue de vipère, un monsieur catastrophe, un stagiaire BGBC (Beau Gosse, Bras Cassés) et des supérieurs avares en reconnaissance, tous à la limite du stéréotype tant leurs traits sont épaissis, Joy se noie dans la plus parfaite indifférence.

« Le marchand de sable a bien changé. Autrefois, le soir venu, il jetait gentiment dans les yeux des bambins des grains de sable magique pour les endormir. Aujourd’hui, il sonne à leur porte tous les matins, et leur livre des gros sacs d’enquiquinements de cinq, dix, quinze kilos jusqu’à leur en mettre plein le dos. Ils ont beau expliquer qu’ils n’ont pas demandé à participer à Koh-Lanta, il s’en moque bien, le marchand de stress, il est déjà parti sonner chez le voisin. Ils rêvaient d’être des Petit Prince, mais se retrouvent bien plus souvent cloués au sol que la tête dans les étoiles. »

Au cours d’un salon de l’événementiel, Joy rencontre Benjamin et ses petits Max. Spécialiste de l’impression 3D et des concepts battant hors des sentiers habituels, il travaille dans le même univers que Joy et pourtant, il en est assez détaché. Il s’accorde en tout temps la priorité, l’entreprise vient après l’humain. C’est pourquoi il prend Joy sous son aile, malgré une première impression plutôt désagréable. Après cette entrée en matière, Joy n’a de cesse de souffler le chaud et le froid avec Benjamin qui s’évertue à lui insuffler à nouveau une touche de bonheur et de lumière. À lui réapprendre à respirer. Derrière les œillères de sa routine toxique, Joy refuse de se « désappliquer » pour profiter de la vie et se décharge à plusieurs reprises sur lui. Un pas en avant, trois en arrière ! Idem pour sa relation amoureuse. Elle se plaint – à raison – du comportement de son amant, mais elle ne lui dit rien, se contente au pire de le ghoster une heure ou deux. Le schéma se répète et en devient un brin lassant. Benjamin, en tout cas, dans son extrême bienveillance, n’en est que plus attachant.

Jusqu’au jour où la corde se rompt. Joy craque et je grimace. Quand bien même je comprends à quel point elle se sentait acculée dans sa vie professionnelle et sentimentale, sans oser faire le grand saut pour aller voir ailleurs (car oui, elle mérite mieux), sa contrattaque est à l’image des gens qu’elle accablait de reproches par derrière. Au moment de briser son mutisme, ça part n’importe comment, avec une puissance démesurée. Le pop-corn a explosé ! Mais à vrai dire, j’ai trouvé ça d’une mesquinerie incroyable… Quelque part, au lieu de s’élever, elle s’est abaissée à leur niveau. Benjamin vient nuancer tout cela par la suite, pourtant j’ai été assez déçue par ce rebondissement. Je m’attendais à mieux de la part de Joy. La réaction de ses collègues à cet incident m’a également semblé manquer de naturel. C’était trop édulcoré pour sonner juste. Sans vouloir verser dans le cynisme, je ne suis pas du tout convaincue que dans la « vraie vie », les personnes impactées auraient pris la chose avec autant de philosophie, plutôt que de chercher à se venger. Surtout dans une grande ville comme Paris, où la réputation est un joyau convoité et les contrats des enjeux énormes.

Quoi qu’il en soit, j’ai tout de même passé un bon moment entre ces pages. L’introduction m’a soufflée tant elle est vraie, empreinte d’une ironie joyeuse qui parlera à nombre d’entre nous. La pandémie a modifié notre quotidien, du point de vue de la santé, de l’emploi, de l’inflation, de notre relation à l’autre aussi. On marine dans la morosité ambiante et les ouvrages de développement personnel pullulent sur le marché. J’ai découvert ce roman par audiobook et Jessica Monceau campe admirablement le personnage de Joy, avec sa voix si pétillante et expressive. Son timbre très agréable nous immerge sans problème dans l’action et apporte un vrai plus à cette histoire.

En résumé, même si ce livre manque trop de singularité pour parvenir à se démarquer sur le marché très en vogue du « feel good », il reste plaisant à parcourir et on y trouve de très jolis messages qui nous poussent à positiver, à nous interroger et à faire le point sur notre propre quotidien. Pour les réponses, à chacun d’entre nous de les débusquer !

2 réflexions sur “Le spleen du pop-corn qui voulait exploser de joie

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