L’Alliance de Fer, T1 – Anthony RYAN

PRÉSENTATION DU LIVRE

⌧ CARACTÉRISTIQUES ⌧
FR : L’Alliance de Fer, T1 : Le Paria
VO : The Covenant of Steel : The Pariah
Auteur : Anthony RYAN
Éditeur : Bragelonne
Parution : 02 Mars 2022
Pagination : 552
Prix : 25 €
★ Fantasy ★

« Né dans le royaume troublé d’Albermaine, Alwyn Scribe a été élevé par une bande de hors-la-loi. Vif d’esprit et habile au couteau, il aime la liberté des bois et la compagnie de ses camarades voleurs. Jusqu’à ce qu’une trahison l’entraîne sur le chemin du sang et de la vengeance, un chemin qui fera de lui un soldat dans l’armée du roi.
Placé sous les ordres de dame Evadine, une noble tourmentée par des visions peuplées de démons, Alwyn doit survivre à la guerre et aux intrigues mortelles de la noblesse pour obtenir vengeance.
Mais tandis que les forces des ténèbres – humaines et surnaturelles – se liguent pour neutraliser Evadine, Alwyn va devoir faire un choix : deviendra-t-il un guerrier ou restera-t-il un paria à jamais ? »

EXTRAIT

CHRONIQUE

Fils de prostituée, Alwyn subit son existence plus qu’il ne la vit. À la mort de sa mère, il est encore très jeune, mais cela n’empêche pas le maître des lieux de le jeter dehors séance tenante. Il n’a plus rien à gagner à entretenir l’enfant. Le chemin d’Alwyn croise alors celui de Deckin Scarl, le Roi Bandit, et de sa horde de brigands. À leurs côtés, il apprend à se battre, à voler… à tuer aussi. Alwyn grandit, il a désormais seize ans. Régulièrement en conflit avec d’autres membres de la bande, qu’il juge soit moins forts soit moins intelligents que lui, il cherche à se faire la part du lion. Il veut monter les échelons afin de faire la fierté de Deckin qui adopte parfois des attitudes paternelles à son égard. Dans un pays rongé par une guerre civile où un bâtard revendique le trône, Deckin y voit une occasion en or : celle de s’emparer d’un duché fragilisé pour enfin sortir ses hommes de la forêt. C’est là que la vie d’Alwyn bascule à nouveau. Tour à tour renégat, bagnard, évadé, scribe, soldat et conseiller, il multiplie les talents pour survivre à l’impossible.

Dans ce premier tome, Anthony Ryan nous offre une aventure à la plume soignée. L’univers est sombre, profondément empreint de traîtrise et d’ambition. Les nobles y font couler le sang des manants pour asseoir leur pouvoir en dehors de toute humanité. C’est la loi du plus fort où, quand on naît sans rien, on joue de la lame pour ne pas être piétiné. Alwyn est faillible : il tue mais rechigne souvent à le faire, il se bat bien mais pas autant que d’autres. Il n’est jamais à l’abri de la défaite. Il obéit mais remet constamment en question les statu quo, il se dit athée mais est troublé par la sorcière au sac et les visions d’Evadine, cette noble qui l’embarque malgré lui dans une guerre civile qui revêt vite des aspects de croisade religieuse. Car en plus du roi, règnent l’Alliance et les Martyrs. Leurs reliques sont exposées dans des temples à travers tout le pays. La ferveur qu’ils soulèvent dans le cœur de la population est presque tangible et constitue de ce fait une menace pour les autorités en place. Il faut obtenir la grâce des Séraphiles sans jamais ouvrir la porte aux Malécites, sous peine d’amener le Second Fléau sur terre. Cette notion d’anges et de démons se fait toutefois discrète dans ce premier tome. De menus détails glissés ici et là prennent de l’importance au fil des pages, nous encourageant à pousser plus loin la réflexion, à tenter de deviner ce qui se trame par-delà les champs de bataille et les auberges malfamées. Si le concept reste flou dans l’immédiat, il donne parfois naissance à de jolis retournements de situation comme avec le chaînier.

À l’aube de l’âge adulte, Alwyn se cherche. Dans un monde qui a toujours décidé de son destin à sa place, il entend bien s’affranchir d’un système qu’il juge corrompu, mais se heurte vite aux frontières des possibles. Toria, sa fidèle acolyte, apporte une touche de féminisme bienvenue. C’est un personnage fort, peut-être même plus qu’Alwyn. Elle a la tête sur les épaules, se montre plus indépendante que lui dans le sens où il est plus difficile de l’embrigader pleinement dans les divers complots qui se tissent autour d’eux. Elle sert souvent de point d’ancrage à notre anti-héros, lui qui se laisse volontiers emporter dans la tourmente aux dépens de son entourage.

Si je devais apporter un léger bémol au Paria, c’est peut-être cette façon qu’a Alwyn de s’adresser au lecteur de temps à autre. D’un côté, cela renforce sa position de scribe des plus perspicaces. D’un autre, cela tue parfois le suspense. S’il rédige ses mémoires, on devine bien qu’il a été plus loin dans la vie que les événements relatés ici. Sans parler des moments où il annonce (ou dément) le trépas d’un personnage-clé en engageant une toute nouvelle scène. Je pense notamment à Erchel. Anthony Ryan a toutefois su prendre le contre-pied de cette tendance en brouillant quelques pistes et ces apartés ont aussi l’avantage d’apporter un peu d’humour dans un univers sombre. Les batailles sont très immersives, graphiques et détaillées. On n’aurait pourtant rien perdu à taire l’émission de gaz méphitiques de-ci de-là qui n’ajoutent rien à l’intrigue. La guerre, c’est moche, on le sait. L’accumulation de ces références tourne presque à la blague potache.

En bref, un premier tome intéressant, qui pose de réels angles de réflexion autour du pouvoir et de la religion. Avec de beaux accents vikings lorsque l’auteur nous parle des peuples du Fjord Geld. J’ai dévoré les cinq-cents pages de cet ouvrage et ai hâte de découvrir la suite. Anthony Ryan y évoque clairement la notion de prédestination et de libre arbitre. Quel avenir réserve-t-il à Alwyn ? Jusqu’où ira sa dévotion envers Evadine qui a l’air de plus en plus habitée par quelque force divine ? L’existence des Séraphiles et des Malécites sera-t-elle enfin révélée ? Dans un monde où l’apocalypse semble sur le point de fondre sur les terres de l’Albermaine, que pourra bien faire un ancien voleur – pas si repenti que ça – pour inverser la tendance ?

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.